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Audition de l’APPEP par la mission Mathiot

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Compte rendu de l’audition de l’APPEP par la mission chargée de la concertation sur la réforme du baccalauréat et du lycée, le mercredi 15 novembre 2017

Membres de la mission présents : Pierre Mathiot (Président), Souâd Ayada (IGEN), Stéphane Kesler (IGAEN), Christine Szymankiewicz (IGAEN), Mathieu Monthéard (DGESCO).

Yohan YEBBOU (IGEN) est excusé.

Pour l’APPEP : Nicolas Franck (Président), Didier Brégeon (Vice-Président), Marie Perret (Vice-Présidente)

Pierre Mathiot expose les principaux enjeux des consultations menées par la commission, tels qu’ils ont été définis par le ministère. Il s’agit d’alléger l’organisation du baccalauréat et de reconquérir le mois de juin. Rien n’est encore arrêté puisque les consultations sont en cours et que le rapport ne sera remis au ministre qu’à la fin du mois de janvier. Toutefois, des lignes de force se dessinent. Il n’y aura plus que quatre épreuves finales : deux « épreuves universelles » que les élèves des classes terminales passeront au mois de juin ; deux épreuves de spécialité qu’ils pourraient passer plus tôt (aux alentours des vacances de printemps) et dont les résultats seraient communiqués, pour information, aux écoles et universités via le dispositif qui succédera à APB. Les quatre épreuves terminales devraient se partager au moins 60 % des coefficients de l’examen. À ces quatre épreuves s’ajouterait l’épreuve anticipée de français.

La nouvelle configuration du baccalauréat aura bien évidemment des incidences sur l’organisation de l’enseignement au lycée. Le ministère souhaite une architecture plus modulaire et mieux articulée à l’enseignement supérieur : l’année de Seconde restera une année de détermination ; les lycéens se spécialiseront progressivement à partir de l’année de Première ; la spécialité qu’ils choisiront devrait déterminer leur orientation dans le Supérieur. Rien n’est encore décidé à propos des filières : seront-elles modifiées ou supprimées ? La question n’est pas tranchée et s’avère particulièrement délicate en ce qui concerne la filière technologique, dont le ministère souhaitait initialement la fusion avec les filières générales.

Nous exposons ce que la philosophie apporte aux élèves : ils apprennent à conceptualiser, à comparer la valeur de vérité des discours, à ordonner leur réflexion en remontant aux principes, et ainsi à dialoguer. La philosophie n’est ni sophistique ni agonistique : elle affronte les problèmes qui se posent à tout homme, et permet d’apaiser les tensions au lieu de les exacerber. Nous soulignons l’importance de l’écrit, qui permet aux élèves d’objectiver leur pensée, et les bénéfices qu’ils tirent de ces deux exercices que sont la dissertation et l’explication de texte. Nous rappelons que nous avons besoin de temps avec les élèves. L’émiettement de nos services ces dernières années et la dégradation de notre travail avec les élèves qui en a résulté le prouvent par l’absurde. Nous réaffirmons à nos interlocuteurs l’attachement des professeurs de philosophie au baccalauréat, dont témoigne le rapport sur la session 2017 qui a été transmis à la commission. La présence de la philosophie dans les épreuves finales garantit l’existence de notre discipline en classe terminale et contribue notablement à l’identité de cet examen national. Nous disons notre hostilité au contrôle continu. Il accentuera les pressions sur la notation des professeurs, particulièrement sensibles en philosophie, mais aussi sur les élèves. Le contrôle continu nous ferait perdre la liberté dont nous avons besoin pour aider les élèves à progresser. Un contrôle en cours de formation n’est pas non plus une solution satisfaisante : il risque de désorganiser l’année de Terminale et ne garantit nullement un cadrage national, condition de l’égale valeur du diplôme.

Nos interlocuteurs sont conscients des difficultés posées par l’évaluation en contrôle continu ou en contrôle en cours de formation et disent réfléchir aux moyens de les résoudre.

Ils nous informent que la philosophie figurera en épreuve finale, à titre de première « épreuve universelle ». Ils envisagent une épreuve de philosophie commune à tous les candidats, qui porterait sur le même sujet. La philosophie figurera donc dans le tronc commun en Terminale et existera également comme spécialité que les élèves pourront choisir dès l’année de Première. La deuxième « épreuve universelle » devrait être une épreuve orale, inspirée du colloquio dans la maturità, l’examen national de fin d’enseignement secondaire en Italie : les candidats présenteront devant un jury de professeurs un travail personnel à caractère pluridisciplinaire. En toute logique, la philosophie pourrait aussi figurer dans ce « grand oral » pluridisciplinaire.

La commission précise que les attributions horaires ne sont pas encore arrêtées.

Elle souhaite que l’APPEP réfléchisse à la conception de sujets communs à tous les élèves de terminale, quelle que soit leur filière. Ces sujets devront être élémentaires. Elle nous demande également de réfléchir au contenu d’un enseignement de la philosophie comme spécialité et au type de sujets sur lequel les candidats seront interrogés dans le cadre de cette épreuve.

Nous interrogeons la commission sur l’avenir de l’EMC, mais nous n’obtenons aucune réponse. Nous demandons s’il est question de réformer aussi l’enseignement professionnel. P. Mathiot nous informe que la mission chargée de la réforme de l’enseignement professionnel et de l’apprentissage devrait auditionner prochainement l’APPEP.

Nous remercions nos interlocuteurs pour leur attention et pour la liberté qui a présidé à ces échanges, qui ont duré près d’une heure et demie.

L’APPEP adressera une contribution écrite à la commission, comme celle-ci le lui a proposé. Elle continue d’appeler à une réflexion de l’ensemble de la profession sur la réforme dans sa structure globale et dans  ses incidences disciplinaires (programmes, horaires, sujets d’examen).

Elle considère que, sans un horaire minimal de 4 h dans le tronc commun, et de 3 h en spécialité, en Terminale comme en Première, les élèves ne pourraient tirer un profit suffisant d’un enseignement de philosophie, et donc être convenablement préparés à l’épreuve terminale de ce nouveau baccalauréat.

Elle s’inquiète du risque d’augmentation des effectifs dans les classes du fait de la suppression des filières.

Compte rendu rédigé par Marie Perret, avec Didier Brégeon et Nicolas Franck.