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Motions des départements de philosophie sur les réformes en cours

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Les directrices et directeurs de programme du Collège international de philosophie (CIPh) réunis le 17 janvier en assemblée collégiale expriment leur vive inquiétude à l’égard des réformes en cours.

Le CIPh, composante de l’université Paris Lumières, pensé à l’origine comme un lieu de passage et d’hospitalité pour des chercheurs «sans titre» ou «sans statut», reste un espace d’échanges pour une pensée vivante et en train de se faire, accueillant en son sein jeunes chercheurs, universitaires, chercheurs indépendants, français ou étrangers, enseignants du secondaire qui voient dans la simultanéité de ces contre-réformes en cours ou à venir (retraites, LPPR, CAPES externe de philosophie et plus généralement de la formation des professeurs, réforme du baccalauréat) un renforcement à tous les niveaux de l’individualisation des parcours, de la mise en concurrence des individus comme des établissements et d’une contractualisation généralisée, toutes opposées au développement d’une recherche libre et indépendante et d’un enseignement véritablement démocratique et émancipateur, à la collégialité et à la coopération au nom d’une prétendue excellence, c’est-à-dire d’un retour rapide sur investissement.

Le CIPh apporte ainsi son soutien à la mobilisation contre la diminution drastique de la place des épreuves disciplinaires dans l’évaluation des candidats au concours du CAPES, qui rejoint l’effacement progressif du cadre national des épreuves du baccalauréat. L’impréparation de cette réforme et sa mise en œuvre au pas de charge sans concertation véritable ne peut que s’accompagner d’une baisse des exigences renforçant les inégalités entre élèves et entre lycées et creusant toujours plus l’écart entre le secondaire et le supérieur, sans compter la dégradation des conditions de travail des enseignants du secondaire dont la mission est arrimée à une évaluation continuelle, faisant des élèves des candidats perpétuels auxquels est refusé le temps de l’apprentissage et de l’étude.

S’inscrivant dans cette même logique, la réformes des retraites, mettant fin au régime par répartition, fondé sur une solidarité
intergénérationnelle, au profit d’un système universel par points entérine la flexibilisation du marché du travail, une précarisation et une paupérisation accrue du plus grand nombre à l’exception des plus hauts salaires,  exonérés d’une cotisation proportionnelle à leurs revenus, constituant au sein même de la République une classe à part offerte à un marché de l’assurance retraite. Cette pseudo-universalité n’a rien à voir avec une quelconque égalité, et la distorsion des concepts relève autant d’une agression contre la pensée et l’intelligence collective que d’une attaque contre l’ensemble des salariés.

La philosophie, discipline critique au statut institutionnel fragile et incertain, a beaucoup à perdre dans chacune de ces réformes, et la collégialité incarnée par le CIPh entend modestement faire vivre un contre-modèle : le temps long de la pensée, la liberté, notamment pour de jeunes chercheurs, d’expérimenter, de chercher et de se chercher.

C’est pourquoi le CIPh à travers son assemblée collégiale apporte son soutien aux luttes actuellement menées contre l’ensemble coordonné de ces réformes et appelle la communauté philosophique et plus largement celle de l’enseignement secondaire, supérieur, et le monde de la recherche (étudiants, personnels administratifs, enseignants, chercheurs et enseignants-chercheurs) à se mobiliser et à définir des moyens d’action qui permettront d’en empêcher la mise en œuvre. Il désignera en ce sens au cours d’une assemblée collégiale extraordinaire le 30 janvier l’un ou l’une de ses membres pour le représenter lors des États généraux de l’enseignement supérieur et de la recherche les 1er et 2 février prochains.

Motion adoptée par l’assemblée collégiale du CIPh le 17 janvier 2020

Université de Strasbourg

MOTION DE LA FACULTÉ DE PHILOSOPHIE

réunie en assemblée générale le 17 janvier 2020

 

Les membres de la faculté de philosophie de l’université de Strasbourg réunis ce jour, 17 janvier 2020, en assemblée générale s’alarment de la simultanéité des attaques portées contre la fonction publique et ses agents par la réforme des retraites, et contre le service public d’enseignement supérieur et de recherche par les orientations figurant dans les rapports préparatoires à la loi de programmation pluriannuelle de la recherche :

  • dérogation à la procédure nationale de qualification par le CNU, remise en cause du statut national des enseignants-chercheurs,
  • fin de la clause d’accord des intéressés pour la modulation des services,
  • fin de la référence aux 192 heures équivalent travaux dirigés et de la rémunération des heures complémentaires,
  • extinction du corps des maîtres de conférences, remplacé par des formes de contractualisation aggravant la précarisation des chercheurs,
  • alourdissement de la charge de travail des personnels enseignants et administratifs sans compensation de revenu,
  • mise en concurrence des individus au nom de « l’excellence ».

Le même attachement au cadre national du recrutement, à un service public de qualité et aux libertés académiques conduit l’assemblée générale de la Faculté de philosophie à s’opposer résolument à la réforme de la formation des enseignants du secondaire et spécialement du concours du CAPES, définitivement vidé de ses exigences et de son contenu disciplinaires.

L’assemblée générale de la Faculté de philosophie déclare son soutien aux luttes actuellement menées contre l’ensemble de ces « réformes » et appelle la communauté universitaire (étudiants, personnels administratifs, enseignants, chercheurs et enseignants-chercheurs) à se mobiliser et à utiliser tous les moyens légaux qui permettront d’en empêcher la mise en œuvre.

L’Assemblée Générale de l’UFR PHILLIA, réunie aujourd’hui lundi 20 janvier 2020 en salle LR15, de 13h à 15h30, a voté les trois points suivants :

1/ L’Assemblée Générale adopte, à l’unanimité, la motion rédigée par le Département de Lettres, et déjà votée par le département d’Arts du Spectacle et de Philosophie, et demande à ce que cette motion soit présentée en Conseil d’UFR pour être relayée auprès des autres UFR.

Nous, signataires de cette motion rédigée à l’issue de l’assemblée extraordinaire du département de Lettres Modernes du lundi 13 janvier 2020, tenons à manifester notre opposition résolue aux orientations qui s’expriment dans les trois rapports remis à la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche en vue du projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche (« Financement de la recherche », « Attractivité des emplois et des carrières », « Recherche partenariale et innovation »), notamment :

  • la remise en cause radicale du statut d’enseignant-chercheur (disparition de la clause d’accord pour la modulation du service, du référentiel d’heures d’enseignement à l’année et donc du paiement des heures complémentaires ; recours massif à des enseignant.e.s non chercheurs et/ou précaires) ;
  • la mise en danger, sinon la disparition programmée, du corps des maître.sse.s de conférence au bénéfice de tenure tracks (carrière soumise à une évaluation permanente et à des impératifs de productivité quantitative, peu favorables à une recherche sereine) ;
  • l’affaiblissement des instances nationales de qualification, de recrutement et de suivi de carrières des enseignants-chercheurs (disparition du CNU avec risque accru de recrutements arbitraires, inégalités dans les promotions, ) ;
  • la mise en concurrence des personnels au sein des unités de recherche et des départements (primes à la performance, inégalités de traitement, modulation des services d’enseignement selon une logique d’économies collectives, et sans reconnaissance des spécificités de l’enseignement et des innovations pédagogiques) ;
  • limitation radicale de la liberté de la recherche (généralisation d’un financement de la recherche par projets ; marginalisation de la recherche fondamentale au profit d’orientations déterminées au niveau ministériel ; risques inhérents au déploiement d’une science d’État).

Sans remédier à la dégradation générale de notre métier, pourtant constatée, dans ces trois rapports, la mise en application de ces préconisations aggraverait à la fois nos conditions de travail (enseignement, administration, recherche) et celles, corrélées, de nos étudiant.e.s ainsi que des personnels administratifs.

En outre, ces préconisations s’inscrivent dans le contexte

  • des projets de réforme des retraites (les « compensations » salariales aux pertes de pension sont explicitement renvoyées par Mme Vidal au « contexte particulier du projet en cours d’élaboration de loi de programmation pluriannuelle de la recherche » – préparant la fragilisation des statuts par les primes différenciées) ;
  • ou encore de la loi PACTE (qui touche déjà les personnels administratifs, notamment à travers ses « CDI de chantier »), allant dans le sens d’une précarisation généralisée des métiers de l’enseignement et de la recherche.

Leur logique rejoint les récentes réformes du baccalauréat, les refontes des concours de recrutement des enseignants et la création récente des établissements « expérimentaux » d’enseignement supérieur. C’est pour dénoncer cette logique que nous proposons la mise en place, à différentes échelles, d’actions permettant de manifester notre opposition résolue.

2/ L’Assemblée Générale s’associe à la demande de réservation de l’amphi C1 pour la semaine du 20 au 25 janvier 2020 pour proposer aux étudiants et aux personnels des cours alternatifs dans le cadre de la mobilisation des enseignants-chercheurs. Adoptée à l’unanimité moins 2 voix.

3/ L’Assemblée Générale invite les collègues de l’UFR PHILLIA à rejoindre la mobilisation interprofessionnelle lors des journées nationales et interprofessionnelles en se déclarant en grève ces jours-là, à commencer par le vendredi 24 janvier, demande la banalisation par l’Université de cette dernière journée et demande que le Conseil d’UFR soutienne cette revendication auprès de la Présidence.

4/ L’Assemblée Générale de l’UFR PHILLIA décide de se réunir à nouveau le mardi 28 janvier 2020 à 13h et appelle les collègues à rejoindre le cortège de l’ESR vendredi 24 janvier ; l’horaire et le lieu de rendez-vous seront annoncés prochainement.

Motion adoptée par les enseignants de l’UFR de philosophie de l’Université Rennes 1

Les membres de l’UFR de philosophie de l’Université Rennes 1 réitèrent leur opposition à la réforme des retraites telle qu’elle est proposée par le gouvernement et s’alarment des attaques portées contre les services publics et leurs agents. Ils manifestent tout particulièrement leur opposition aux orientations contenues dans la Loi de Programmation Pluriannuelle de la Recherche :

  • Remise en cause du statut national des enseignants chercheurs
  • Fin de la référence aux 192 heures équivalent travaux dirigés et de la rémunération des heures supplémentaires
  • Extinction du corps des maîtres de conférences, remplacé par des formes de contractualisation aggravant encore la précarisation des chercheurs, et tout particulièrement des plus jeunes chercheurs
  • Désolidarisation de l’enseignement et de la recherche et dévaluation aggravée de l’enseignement
  • Alourdissement de la charge de travail administratif et bureaucratique déjà intolérable des personnels enseignants et administratifs
  • Mise en concurrence des individus au nom d’une « excellence » indéterminée et d’une application aberrante d’un modèle prétendument « darwinien » et explicitement inégalitaire

    Le même attachement au cadre national du recrutement, à un service public de qualité et aux libertés académiques conduit les enseignants de l’UFR de philosophie à s’opposer résolument à la réforme de la formation des enseignants du secondaire et spécialement du concours du CAPES, vidé de ses exigences et de son contenu disciplinaires.

    Les enseignants de l’UFR de philosophie déclarent leur soutien aux luttes actuellement menées et s’associent à la mobilisation de toute la communauté universitaire (étudiants, personnels administratifs, enseignants, chercheurs et enseignants-chercheurs) contre l’ensemble de ces « réformes ».

Les membres du département de philosophie d’Aix Marseille Université expriment leur vive inquiétude face au projet de « loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR) ». Le projet de LPPR annonce :

  • l’amplification de la contractualisation et de la précarisation dans l’Enseignement Supérieur et la Recherche (tenure tracks, CDI de projets, etc.) et des personnels BIATSS et ITA ;
  • la remise en cause du statut des Enseignant.e.s- Chercheur.e.s et des Chercheur.e.s avec la disparition de la référence aux 192h équivalent TD ;
  • la remise en cause des fonctions du CNU et de la collégialité de l’évaluation des carrières par les pairs (ces fonctions seraient alors assurées par les Universités, ce qui renforcerait encore davantage les logiques localistes).

Cette réforme généralise la précarisation, asservit la pensée à une logique managériale, anéantit la liberté d’étude et de recherche.

Nous appelons les enseignant-e-s chercheur-e-s de l’UFR ALLSH à se mobiliser et à manifester par tous les moyens leur opposition au projet de LPPR.

Motion du Département de philosophie de l’École normale supérieure contre le projet Loi de programmation plurielle de la recherche

Nous, enseignants-chercheurs et chercheurs du Département de philosophie de l’École normale supérieure, après avoir pris connaissance des éléments contenus dans les rapports préalables au projet de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR), affirmons notre opposition aux mesures envisagées, si elles devaient suivre les pistes esquissées dans ces trois rapports.

La multiplication des appels à projet pour la recherche, la suppression de la qualification via le Conseil National des Universités, la modulation des services ou encore la recrudescence des contrats précaires ne peuvent que nuire aux conditions d’exercice de notre métier et, par là même, à la transmission et à la production de savoirs de qualité, indépendants et collaboratifs, dans notre discipline.

Comme de nombreux départements, laboratoires et revues scientifiques, nous tenons à marquer notre profond désaccord avec ce projet et en appelons à la mobilisation sous différentes formes (manifestations, assemblées générales, etc.) contre ce projet. Nous tenons, plus généralement, à marquer notre profonde opposition aux réformes qui mettent à mal le statut de fonctionnaire, les missions d’enseignant et de chercheur, et la qualité du recrutement des futurs enseignants du secondaire.

Nous interpellons enfin la direction de l’École normale supérieure pour qu’elle relaye les inquiétudes de ses personnels et étudiants auprès du ministère.

 

Adoptée en réunion du conseil du Département de philosophie le 6 février 2020.

Merci de nous adresser les motions qui ne figurent pas encore sur cette page:

contact@appep.net