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Lettre au ministre de l’Éducation nationale

Publié le

Paris, le 21 septembre 2020

Objet : Aménagement de l’année scolaire 2020-2021 afin de tenir compte des effets du confinement et de la crise sanitaire.

Monsieur le Ministre,

L’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public a mené pendant l’été une enquête sur l’année 2019-2020, et sur les attentes des professeurs de philosophie pour la présente année scolaire, qui sera marquée par l’entrée en vigueur de la réforme en Terminale, l’effacement du baccalauréat et la crise sanitaire. 

Près de mille professeurs de philosophie y ont répondu, conférant ainsi à ses résultats une incontestable représentativité. Vous en trouverez le rapport de synthèse joint à ce message.

Parmi les inquiétudes exprimées par les professeurs de philosophie, certaines sont directement liées aux conditions de travail avec les élèves, que la crise sanitaire et la réforme que vous avez engagée ont considérablement détériorées. Les emplois du temps éclatés, la multiplication des classes à effectifs pléthoriques, la reprise du travail avec des élèves qui n’ont pas eu de cours dans un lycée depuis près de six mois, la menace d’une fermeture ponctuelle et provisoire de leur établissement ou d’un nouveau confinement sont autant d’obstacles à un travail scolaire serein et utile pour les élèves. L’année 2020-2021 ne peut être considérée comme une année normale.

Nous vous demandons donc quelles adaptations vous envisagez pour que le travail mené avec les élèves se fasse dans les conditions les moins défavorables possible. 

L’APPEP considère que trois aménagements s’imposent de façon prioritaire. 

  1. La suspension de l’épreuve du «Grand oral ». Cette nouvelle épreuve est censée se préparer en deux ans. Il fut impossible de s’y consacrer l’année dernière. Il en sera de même cette année, puisqu’aucune heure n’est allouée à sa préparation, et que la tâche des professeurs pour remédier aux effets du confinement ne laisse aucune liberté pour l’assurer. Ce manque obvie de préparation accentuera les défauts intrinsèques d’une épreuve prévue pour évaluer principalement des qualités formelles détachées de tout contenu ou, pire encore, la personnalité du candidat. Pour l’APPEP, cette suspension doit être l’occasion de redéfinir une épreuve qui, dans son état actuel, entre en contradiction avec une formation disciplinaire.
  2. Un allégement des programmes de philosophie.  Une telle disposition est indispensable pour laisser aux professeurs le temps de travailler avec leurs élèves en diminuant la pression de l’examen. Trois notions dans la voie générale, une dans la voie technologique doivent donc être exclues des sujets d’examen. Cet aménagement doit être décidé et annoncé sans tarder, afin que les professeurs puissent ajuster leur cours en conséquence.
  3. La possibilité d’un dédoublement d’une heure hebdomadaire de philosophie. Cette mesure, vitale en temps normal dans la voie technologique, peut permettre au professeur de philosophie qui en fait la demande d’ajuster le travail aux besoins des élèves de la voie technologique comme de la voie générale et de combler ainsi certaines des lacunes dues au confinement.

L’APPEP s’adresse par ailleurs à l’Inspection générale de philosophie afin que certaines prescriptions irréalistes des Recommandations sur le travail des élèves qu’elle a rédigées soient suspendues.

Nous nous tenons à la disposition de vos services pour exposer plus complètement ces demandes et, plus généralement, les résultats de l’enquête menée pendant l’été. Le nombre significatif de professeurs de philosophie, chevronnés ou plus jeunes, qui avouent aujourd’hui envisager de démissionner est une nouveauté et un signal d’alerte que tous ceux qui sont attachés à l’avenir de l’Éducation nationale devraient prendre au sérieux.

Veuillez accepter, Monsieur le Ministre, l’expression de notre très haute considération,

pour le Bureau national de l’APPEP,

Nicolas Franck