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Motions adoptées par l’Assemblée générale de l’APPEP

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Motion sur la nomination du nouveau ministre de l'Éducation nationale

Après des réformes qui ont malmené les professeurs et maltraité les élèves, après cinq années de mépris systématique de la parole des professeurs et des corps intermédiaires, l’Assemblée générale de l’APPEP, réunie à Paris le 21 mai, prend acte avec soulagement du départ de Jean-Michel Blanquer. Elle attend du nouveau ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, qu’il renoue le dialogue avec les enseignants et leurs associations professionnelles.

Alarmée par l’affaiblissement sans précédent de l’enseignement de la philosophie, par l’état de désorganisation du lycée, et par la démoralisation des personnels, l’Assemblée générale appelle à la constitution d’états généraux de l’Éducation, qui doivent être l’occasion d’une remise à plat des réformes.

Paris le 21 mai 2022

Le ministère doit redéfinir sans attendre l'épreuve de la spécialité HLP

En créant la spécialité « Humanités, littérature et philosophie », le ministère a bricolé de toutes pièces un nouvel objet scolaire. Ni spécifiquement littéraire, ni spécifiquement philosophique, son programme s’apparente à une culture générale aux contours flous. C’est donc en dépit de celui-ci que les professeurs de philosophie enseignent cette spécialité, avec un sentiment d’insatisfaction largement partagé.

Malgré les efforts qu’ils déploient pour qu’elle soit l’occasion d’un enseignement critique de la philosophie, force est de constater que cette spécialité est un échec. Près d’un élève sur deux l’abandonne en fin de première. Ils sont moins de 9 % à la suivre en classe terminale.

Comment pouvait-il en être autrement ? Dès 2018, l’Appep a alerté le ministère sur les défauts rédhibitoires de cette spécialité, conçue dans la précipitation et sans réelle concertation. Comment des élèves peuvent-ils, en première, se spécialiser dans une discipline à laquelle ils ne seront initiés qu’en terminale ? L’inversion de l’initiation et de la spécialisation constitue à elle seule une absurdité logique et pédagogique. En contraignant deux disciplines, dont les situations, les objets et les méthodes diffèrent, à traiter un même programme, cette spécialité, en outre, efface les spécificités disciplinaires. Compte tenu de l’ampleur de celui-ci, l’étroitesse de l’horaire favorise la dispersion et rend impossible un enseignement approfondi. L’épreuve, enfin, oblige les élèves à maîtriser quatre exercices nouveaux, différents de ce qu’ils font, par ailleurs, en français et en philosophie.

Loin de prendre acte de cet échec, le ministère entend faire du programme d’HLP une norme. Le sujet de la première épreuve du Capes externe de philosophie 2022 constituait un premier signe de ce volontarisme. Le programme du concours interne de l’agrégation 2023 le confirme : pour la deuxième épreuve, les candidats seront interrogés sur « l’humain et ses limites », troisième entrée du deuxième thème au programme de terminale.

Il pourrait sembler légitime d’interroger de futurs professeurs de philosophie sur un programme qu’ils auront peut-être à enseigner. Cet argument pourrait s’entendre si le programme d’HLP était un programme de philosophie. Mais tel n’est pas le cas, comme le reconnaissent, du reste, ses auteurs.

Les professeurs de philosophie, dans leur grande majorité, sont attachés à un programme de notions communes, qui incite les élèves à interroger leurs représentations spontanées et qui n’impose aux professeurs aucune orientation doctrinale. Le programme d’HLP est d’une tout autre nature. Il se présente comme un programme de thèmes historiquement situés, dont l’appropriation exige des élèves une érudition inaccessible à la grande majorité d’entre eux. Il impose des choix et des délimitations incompatibles avec la liberté pédagogique du professeur.

La déformation de l’enseignement de la philosophie par la spécialité HLP pose le problème de la cohérence de l’enseignement de la philosophie en classe terminale. Plus fondamentalement, elle constitue une mise en cause de la nature même de cet enseignement ainsi que de ses attendus. Si HLP devient la norme, le but de l’enseignement de la philosophie ne sera plus de former le jugement critique de l’élève. Cet enseignement se réduira à un exercice de remédiation culturelle.

L’Appep réitère sa demande constante d’une mise à plat de la réforme. Les états généraux de l’éducation qu’elle appelle de ses vœux pourraient être l’occasion de concevoir une filière littéraire rénovée, qui respecterait les spécificités disciplinaires et dans laquelle l’enseignement de la philosophie aurait toute sa place.

Pour l’heure, toutefois, l’urgence est à la simplification de l’épreuve d’HLP. Sous sa forme actuelle, cette épreuve est boiteuse et infaisable par les candidats. Elle les disperse et introduit de la confusion avec ce qu’ils font, par ailleurs, en français et en philosophie. Cette épreuve est trop mal conçue pour que le travail des candidats soit évalué avec sérénité, rigueur et équité.

En conséquence et par provision, l’Appep demande au Ministère de redéfinir dès à présent l’épreuve d’HLP. Pour que les candidats puissent composer et faire leurs preuves sans précipitation, celle-ci doit porter sur un texte de philosophie ou de littérature, laissé au libre choix des candidats ou bien déterminé par tirage au sort, qu’ils devront expliquer en quatre heures. Cette nouvelle épreuve doit entrer en vigueur dès la session 2023.

Paris, le 21 mai 2022